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T 1168/23 10-01-2024
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Cosse de batterie equipée d'un shunt de mesure du courant de la batterie
I. Le présent recours a été formé par la titulaire du brevet contre la décision intermédiaire de la division d'opposition relative au brevet n° 2 449 635, dans laquelle il a été constaté que le brevet, tel que modifié conformément à la requête subsidiaire 2, satisfaisait aux exigences de la CBE.
II. Le document suivant est pertinent pour cette décision :
D4 : DE 20 2008 017 318 U1
III. Dans le cadre d'un premier recours concernant le présent brevet et l'opposition dirigée contre celui-ci (T 0960/18), la chambre de recours, dans une composition différente, avait notamment jugé que l'objet de la revendication 1 du brevet délivré était nouveau par rapport au document D4. Dans cette première décision T 0960/18, la chambre de recours avait décidé d'annuler la décision attaquée et de renvoyer l'affaire à la division d'opposition afin de poursuivre la procédure.
IV. Le présent recours de la titulaire du brevet est dirigé contre la décision de la division d'opposition rendue dans le cadre de l'examen complémentaire de l'affaire. Dans cette décision, la division d'opposition avait conclu que l'objet de la revendication 1 du brevet tel que délivré n'impliquait pas d'activité inventive au vu du seul document D4. Par conséquent, la division d'opposition a conclu, entre autres, que le motif d'opposition visé à l'article 100 a) CBE en combinaison avec l'article 56 CBE s'opposait au maintien du brevet tel que délivré (requête principale).
V. La requérante (titulaire du brevet) a demandé par écrit, à titre de requête principale, l'annulation de la décision attaquée et le rejet de l'opposition, ce qui correspond à une requête en maintien du brevet tel qu'il a été délivré ou, si cela n'est pas possible, en maintien du brevet sous une forme modifiée, conformément à la requête subsidiaire 1, sur laquelle la décision attaquée est fondée.
L'intimée (opposante) ne s'est pas prononcée sur le présent recours de la titulaire du brevet.
VI. La revendication 1 de la requête principale (brevet tel que délivré) s'énonce comme suit :
« Cosse de batterie (1) équipée d'un shunt (7) de mesure du courant de la batterie et d'un support (8), tel qu'un circuit imprimé, d'au moins un composant électronique, comprenant une première partie (2) configurée pour être fixée a une borne de la batterie caractérisée en ce qu'elle comporte une deuxième partie (3) configurée pour être fixée au câble de la batterie associé à ladite borne de la batterie, en ce que les deux parties (2,3) sont distinctes l'une de l'autre et dotées de portions saillantes (28, 38) pour porter le shunt (7) et un carter (5, 6) de logement du shunt (7) et du support (8) et en ce que des moyens d'isolation électrique (4, 17) interviennent entre les deux parties (2, 3) de la cosse (1). »
Les revendications 2 à 20 dépendent de la revendication 1.
Compte tenu de la décision suivante, il n'est pas nécessaire de citer les revendications de la requête subsidiaire 1.
VII. Les arguments de la requérante essentiels pour la présente décision peuvent être résumés comme suit :
Motifs de la décision attaquée
Les motifs concernant l'absence d'activité inventive ont été portés à la connaissance de la requérante pour la première fois dans la décision attaquée. Dans la procédure écrite devant la division d'opposition ainsi que pendant la procédure orale, seule l'activité inventive fondée sur le document D4 en combinaison avec le document D5 a été discutée. En outre, lors de la procédure orale, la division d'opposition n'aurait pas expliqué sur la base de quels documents elle considère que l'objet de la revendication 1 du brevet délivré selon la requête principale n'implique pas d'activité inventive. Selon la requérante, ces circonstances justifient donc une modification des moyens invoqués.
Activité inventive au vu du seul document D4
Le document D4 a été utilisé de manière inadmissible comme état de la technique le plus proche. Les arguments fondés sur ce document sont donc irrecevables. En outre, le problème technique objectif formulé par la division d'opposition n'est pas pertinent au regard de la caractéristique distinctive. L'objet de la revendication 1 de la requête principale n'est pas évident eu égard au document D4 et à la lumière du problème technique objectif correct, à savoir améliorer l'isolation électrique de la cosse.
1. Droit d'être entendu
Étant donné que la titulaire du brevet n'a demandé qu'à titre subsidiaire une procédure orale au cas où la chambre de recours ne ferait pas droit au recours, mais que cette condition ne s'est pas réalisée, et que l'opposante n'a pas présenté de requête en procédure orale, il peut être rendu une décision sur le présent recours sans procédure orale dans le cadre d'une procédure écrite. Le droit d'être entendu est donc respecté.
2. Motifs de la décision attaquée
2.1 La chambre constate que la décision attaquée ne contient pas de motifs surprenants sur lesquels la requérante n'aurait pas pu se prononcer. En particulier, il ressort du procès-verbal de la procédure orale du 7 mars 2023, voir point 2.2.6, que l'opposante (intimée) a argué que, partant du document D4, l'homme du métier parviendrait à l'objet de la revendication 1 même sans considérer le document D5. En outre, il ressort du point 2.3.6 que la requérante s'est également prononcée sur cette objection.
2.2 Certes, il ressort du point 2.4 du procès-verbal que la division d'opposition n'a pas expliqué sur la base de quel document ou de quelle combinaison de documents elle a considéré que l'objet de la revendication 1 du brevet tel que délivré n'impliquait pas d'activité inventive. Elle n'était cependant pas tenue de le faire.
Ce qui est déterminant est que le motif mentionné dans la décision (absence d'activité inventive sur la base du seul document D4) était connu de la requérante et qu'elle a eu l'occasion de s'exprimer à ce sujet, ce qu'elle a fait.
2.3 Néanmoins, la requérante a, bien entendu, eu le droit de s'exprimer sur les motifs détaillés de la décision de la division d'opposition dans le cadre du mémoire exposant les motifs du recours. Cela est même requis par l'article 12(3) RPCR, selon lequel le mémoire exposant les motifs du recours doit contenir l'ensemble des moyens invoqués par une partie et, par conséquent, doit présenter de façon claire et concise les motifs pour lesquels l'annulation de la décision attaquée est demandée.
2.4 Pour cette seule raison, les arguments avancés dans le mémoire exposant les motifs du recours sont pleinement pris en considération. Par ailleurs, aucun argument contraire n'a été présenté par l'intimée.
3. Requête principale - Activité inventive au vu du seul document D4 (Article 100 a) CBE en combinaison avec l'article 56 CBE)
3.1 L'objet de la revendication 1 de la requête principale implique une activité inventive au vu du seul document D4.
3.2 Dans la décision attaquée, la division d'opposition a considéré que l'objet de la revendication 1 de la requête principale ne se distinguait que par la caractéristique selon laquelle « des moyens d'isolation électrique (4, 17) interviennent entre les deux parties (2, 3) de la cosse (1) ». La division d'opposition a considéré que le problème technique objectif était de
« modifier la cosse de batterie divulguée par D4 pour améliorer l'intégrité de celle-ci contre les contaminants, tels que l'eau, les débris, etc. ». Elle avait déjà énoncé ce problème technique objectif dans son avis préliminaire (voir la notification du 16 septembre 2022). En outre, la division d'opposition a conclu que partant de D4, l'homme du métier aurait été incité par ses connaissances techniques à mettre en ½uvre la caractéristique distinctive de D4 afin de résoudre le problème technique objectif (voir point 25.4.1 des motifs de la décision attaquée).
L'état de la technique le plus proche
3.3 La requérante estime que le document D4 ne constitue pas l'état de la technique le plus proche et que, pour cette raison même, toute argumentation fondée sur ce document dans le cadre de l'approche problème-solution n'est pas admissible.
3.4 La chambre n'est pas convaincue par cet argument de la requérante. Selon l'article 56 CBE, une invention est considérée impliquer une activité inventive si, pour l'homme du métier, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE. Dans ce contexte, la définition d'un état de la technique le plus proche constitue une approche favorable à l'économie de la procédure, car si l'invention n'est pas évidente par rapport à l'état de la technique le plus proche, on peut supposer qu'elle ne l'est pas non plus par rapport à un état de la technique plus éloigné. Inversement, il peut être plus facile de constater l'absence d'activité inventive par rapport à l'état de la technique le plus proche.
Toutefois, si, comme en l'espèce, la division d'opposition parvient à la conclusion que l'objet revendiqué n'implique pas d'activité inventive, il est sans importance que le document utilisé comme point de départ soit ou non l'état de la technique le plus proche. Par conséquent, il suffit de démontrer que l'objet de la revendication 1 est évident par rapport à l'état de la technique, qu'il s'agisse ou non de l'état de la technique le plus proche.
Indépendamment des différences invoquées par la requérante en ce qui concerne les effets techniques, il est donc en principe admissible d'utiliser le document D4 comme point de départ dans le cadre de l'appréciation de l'activité inventive.
La décision attaquée n'est donc pas contestable sur ce point.
Le problème technique objectif
3.5 L'argument de la requérante, selon lequel le problème technique objectif formulé par la division d'opposition à la lumière de la caractéristique distinctive n'est pas approprié, est considéré comme pertinent. En effet, la requérante a argumenté à juste titre que la revendication 1 concerne explicitement les moyens d'isolation électrique. Il ressort donc sans aucun doute du libellé même de la revendication 1 que les moyens d'isolation électrique servent à isoler électriquement les première et deuxième parties. L'amélioration de l'intégrité du système contre les contaminants n'est pas liée à l'isolation éléctrique et ne peut donc être un effet technique raisonnable en partant du document D4 et en considérant la caractéristique distinctive. Cela est conforme à la description du mode de réalisation de l'invention, notamment aux paragraphes [0029] à [0031] en combinaison avec les figures du brevet tel que délivré.
Compte tenu de l'effet technique des moyens d'isolation électrique, le problème technique objectif ne peut raisonnablement être considéré autrement que comme l'amélioration de l'isolation électrique de la cosse, comme avancé par la requérante.
Solution
3.6 La solution selon la caractéristique distinctive en partant du document D4 et en considérant le problème technique objectif n'est pas évidente pour l'homme du métier.
L'homme du métier ne réaliserait pas d'isolation éléctrique entre la partie 46 ("Kabelschuh 46") et la prise électrique 20 ("elektrischer Abgriff 20") du shunt. En effet, comme l'a fait valoir la requérante, les deux parties 46 et 20 sont reliées électriquement entre elles, notamment par soudage (voir paragraphe [0067] en relation avec la figure 9 du document D4). Elles sont donc au même potentiel électrique et l'homme du métier n'aurait, pour cette raison, aucune raison de prévoir des moyens d'isolation électrique qui interviennent entre la partie 46 et la partie 20.
Par ailleurs, il convient de partager l'avis de la requérante selon lequel la première partie au sens de la revendication 1 est la cosse 2 (en combinaison avec les éléments 4 et 8), tandis que la deuxième partie au sens de la revendication 1 est formée par la cosse 46. Ces parties peuvent être comprises comme étant dotées, au sens de la revendication 1, de portions saillantes pour porter le shunt.
Ainsi, même si l'homme du métier avait effectué une isolation, notamment électrique, au niveau des parties 46 et 20, comme l'a supposé la division d'opposition, il ne s'agit clairement pas de moyens d'isolation électrique qui interviennent entre la première et la deuxième parties de la cosse, comme prévu par la revendication 1.
En partant du document D4, l'homme du métier qui aurait constaté que l'isolation éléctrique entre la première et la deuxième parties de la cosse se fait uniquement par l'air ambiant, aurait tout au plus essayé d'améliorer l'isolation électrique dans la cosse en augmentant la distance entre la première et la deuxième parties de la cosse.
L'homme du métier n'aurait donc eu aucune raison de prévoir des moyens d'isolation électrique entre la première et la deuxième parties, et on ne voit pas non plus comment il aurait pu modifier la structure de la cosse pour prévoir des moyens d'isolation électrique correspondants entre les deux parties 46 et 2.
À la lumière de ces considérations, la chambre a conclu que l'objet de la revendication 1 n'est pas évident pour l'homme du métier en partant du document D4.
3.7 La chambre a donc conclu que l'objet de la revendication 1 implique une activité inventive au vu du seul document D4.
Étant donné qu'aucune autre objection n'a été examinée dans la décision attaquée s'opposant au maintien du brevet tel qu'il a été délivré et l'intimée n'ayant pas soulevé d'autres objections relatives à une absence d'activité inventive de l'objet de la revendication 1 de la requête principale, la chambre a conclu que le motif d'opposition en vertu de l'article 100 a) CBE en combinaison avec l'article 56 CBE ne s'oppose pas au maintien du brevet tel qu'il a été délivré.
Étant donné qu'aucune autre objection n'a été soulevée contre la requête principale, la chambre a dû faire droit à la requête principale de la requérante.
Par ces motifs, il est statué comme suit
1. La decision contestée est annulée.
2. Le brevet est maintenu tel que delivré.